Dans le cadre de la coopération entre l'USTKE et la CGT, une formation de formateurs a été organisée au CCEOP (Centre Confédéral d'Education Ouvrière et Populaire) du lundi 24 au vendredi 28 juin dernier au siège du syndicat à Nouméa. Objectif : doter l'organisation d'un vivier de formateurs chargés par la suite de dispenser les modules retenus par l'USTKE. Une formation animée par Mariannick Lebris de l'Espace International de la CGT qui a mis l'accent sur la pédagogie de la formation et qui a vu la participation d'une vingtaine de camarades des différentes fédérations de l'USTKE.
Interview de Kévin Hirovanaa (à droite), 35 ans, employé à Néabat, DS de la section STKE/Néabat. Photo ci-dessous : au moment de la remise de l'attestation de réussite à la formation des formateurs, le vendredi 28 juin 2013.
1/ Quelles ont été vos motivations pour venir assister à cette formation ?
Kévin Hirovannaa : J'ai fait une formation dans le secteur de la prévention sur la sécurité à l'intérieur de mon entreprise. Et en fait, je n'arrivais pas à me faire entendre et me faire comprendre auprès de mes collègues. J'ai beau faire des quarts d'heure ou des réunions de sécurité auprès des salariés mais rien n'y fait. C'est comme si ça rentre dans une oreille et ça ressort dans une autre oreille. Soit je m'exprime mal ou soit les méthodes ou les techniques que j'employe ne sont pas très assimilables ! Et cette formation de formateur pourrait m'être utile à l'avenir ! Ça pourrait me donner plus d'outils ou de méthodes à formuler sur des formations dans n'importe quel domaine.
2/Qu'est-ce que vous attendez de cette formation ?
K.H. : J'espère assimiler en fin de parcours les méthodes d'apprentissage afin de les réutiliser avec n'importe quel thème ou sujet qui me sera donné.
3/ A mi-parcours de cette formation, quel est votre ressenti ?
K.H. : C'est ma première formation au niveau du syndicat. J'apprends, j'observe, j'analyse et je partage les informations que j'ai avec mes camarades. J'apprends beaucoup et en 3 jours, on a beaucoup ingurgité ! Dans ce groupe, il y a une bonne entente entre nous. Une bonne participation et une bonne ambiance ! La formatrice nous motive et ça nous donne envie d'aller plus loin ! Si d'autres formations se font, il ne faudra pas hésiter.
Interview de Marcelin Trohmae (à gauche), 39 ans, ethno-psychologue au CHT, SGA de la section STKE au CHT, délégué du personnel au CHT. Photo ci-dessous : au moment de la remise des attestations de réussite à la formation de formateurs, le vendredi 28 juin 2013.
1/ Quelles ont été vos motivations pour cette formation ?
Marcelin Trohmae : En fait, ma première motivation : c'est d'acquérir de outils pour mieux travailler dans la cellule syndicale voire les développer par la suite. Ma deuxième motivation : c'est aussi important de se confronter à d'autres camarades qui viennent de secteurs différents. En fait, je n'ai pas l'occasion de pouvoir les côtoyer dans d'autres moments. Je profite un peu de l'occasion pour aussi les connaître. Par ce biais là et la venue de la formatrice de la CGT, on peut acquérir des outils.
2/ Ça rejoint un peu vos attentes par rapport à cette formation de formateurs ?
M.T. : Ça correspond bien aux attentes de chacun d'entre nous qui participons à cette formation. Il y a des choses que je vais prendre pendant cette formation ou même où j'ai été surpris.
3/ A mi-parcours de cette semaine chargée, quel est votre ressenti ?
M.T. : La pédagogie qui a été initiée par la formatrice nous a permis d'acquérir des connaissances, de prendre confiance dans le groupe. En fait, il y a une dynamique qui s'est créée. Tout le monde apprend, souhaite apprendre davantage et mes camarades sont motivés pour la suite. Je crois que la clé de cette formation est là, elle est dans la motivation ! Ce qui a permis à chacun de prendre conscience du potentiel que chacun avait en soi. Cette formation a permis de potentialiser les gens. Maintenant, il y a des ressources qui sont là et c'est intéressant que le syndicat puisse utiliser ces potentiels existants.
4/ En fin de formation, un bilan ou une évaluation sera fait. Certains d'entre vous, serez-vous à même d'utiliser ce que vous avez appris ?
M.T. : Je pense que c'est le défi posé aux stagiaires. En fait, on nous demande d'acquérir des méthodes et de maîtriser un certains nombre d'outils pour pouvoir demain les réinvestir dans des formations. Après je pense que c'est aussi la politique de la formation du syndicat qui se dessine dans tout ça. C'est à dire comment va-t-on demain mobiliser ces personnes ressources, qu'est-ce qu'on va en faire ? Quelle est l'idée derrière ? Il faut tout le temps qu'on se réinterroge ! Car les formations ne seront pas les mêmes ou les sujets abordés ne seront pas les mêmes. Les personnes qui seront formateurs ne seront pas les mêmes, les publics ne seront pas les mêmes donc tout le temps il faudra qu'on se réinterroge. On se disait entre nous qu'il faudra qu'on se retrouve entre formateurs afin de débattre, de se questionner, de poser les bonnes questions, de travailler. Je crois bien que les objectifs que les uns entendent et les autres entendent ne sont pas les mêmes donc il serait bien qu'on se retrouve. Donc, se pose la question du travail à entreprendre demain au sein du syndicat.
Interview de Mariannick Lebris, intervenante et formatrice de formateurs, chargée par la CGT de dispenser une semaine de formation aux futurs formateurs de l'USTKE. Représentante de la CGT au comité pédagogique de l'institut syndical européen et formatrice européenne des formations de formateurs pour les organisations membres de la confédération européenne des syndicats.
1/ Parlez-nous brièvement de votre parcours avant d'arriver à l'Espace Europe International.
Mariannick Lebris : Je me suis syndiquée pratiquement dès mon premier travail quand je suis sortie de l'université. J'ai commencé à travailler chez Pernaud Ricard International dans les relations publiques. J'ai tout de suite pris ma carte à la CGT et là j'ai eu une activité locale dans l'entreprise. Quand j'ai quitté Pernaud Ricard, j'ai ensuite travaillé comme interprète et traductrice et là encore je me suis syndiquée partout où j'ai été. Interprète en langue espagnole et en anglais dans le secteur de la métallurgie. A ce moment là, la CGT était à la recherche de camarades qui puissent parler des langues étrangères puisqu'il y avait un manque et des camarades étaient partis à la retraite. Donc, il se trouvait que dans mon union locale à Saint-Denis, il y avait des camarades qui avaient des responsabilités à la CGT. Ils m'ont demandé si je voulais bien participer et les aider dans les congrès. Et ça a commencé comme ça. A Saint-Denis (située dans la banlieue parisienne), j'ai grandi dans une famille bretonne et dans un quartier où on était les seuls français. On était avec nos voisins algériens, polonais, marocains, italiens, espagnols... Un milieu très multiculturel et très agréable. Et puis, je suis rentrée au moment où il fallait préparer le congrès de la CGT à Lille en 1981. Là, j'ai été l'interprète des délégations d'Amérique Latine puisque ma première langue c'est l'espagnol. Progressivement, je me suis investie dans ce travail. Et plus tard, je n'avais plus de travail et le responsable International de la CGT m'a demandé si je voulais définitivement travailler au sein de la CGT. Et ça c'était dans le début des années 80, donc je suis rentrée à l'Europe International comme interprète-traductrice et également pour prendre en charge toute la documentation internationale. Et progressivement, je me suis investie de plus en plus. J'étais dans l'équipe qui suivait les réunions à la FSM (Fédération Syndicale Mondiale quand la CGT était adhérente) et j'étais également dans les rangs de l'équipe qui siégeait à l'OIT (Organisation Internationale du Travail). Ensuite, j'ai pris en charge les relations de la CGT avec le Sud de l'Europe (Espagne, Italie, Portugal, Grèce, Turquie) car je parlais déjà une partie des langues de ces pays. En 1999, la CGT m'a demandé si je souhaitais changer de type de responsabilités donc de devenir collaboratrice (à l'époque ça s'appelait ainsi) en tant que conseillère confédérale c'est à dire d'assumer des responsabilités politiques dans l'organisation. Ce que j'ai accepté. Je me suis donc occupée de l'Est de l'Europe (Europe centrale, Ex-URSS, les Balkans). Et c'est là que la CGT avait noté qu'il y avait un problème de formation syndicale. Elle a demandé à tous les permanents politiques de suivre une formation de formateurs et qu'ils soient capables de transmettre ce qu'ils savaient faire, ce qu'ils connaissaient à d'autres militants de la CGT. Donc, je suis allée faire le stage de formation. J'ai acquis de l'expérience au fur et à mesure de ma participation à des stages. En 2006, en plus de l'Europe de l'Est, j'ai pris la responsabilité de la formation syndicale sur les questions européennes et internationales dans la CGT ce qui m'a amené à être impliquée dans l'activité « Formation syndicale générale » depuis 2 ans (acquérir de l'expérience, faire des formations ...) Et puis aujourd'hui, arriver à avoir des responsabilités nationales sur la formation syndicale et européenne puisque je représente la CGT au comité pédagogique de l'institut syndical européen et j'assure comme formatrice européenne des formations de formateurs pour l'ensemble des organisations membres de la confédération européenne des syndicats.
2/ On revient à Mars denier où l'USTKE et la CGT ont signé un protocole d'accord de coopération entre les deux organisations notamment dans le secteur de la formation. Y'avait-il un programme défini à ce moment là ?
M.L : Oui, entre temps, j'ai changé de responsabilités. J'ai pris en charge les relations de la CGT avec la région Asie-Pacifique. On a réorganisé notre façon de travailler c'est-à-dire les pays d'outre-Mer sont rattachés au zone géographique, donc la Calédonie, la Polynésie entrent dans mon domaine de responsabilité en plus de la formation syndicale. Au mois de septembre 2012, quand les camarades de l'USTKE sont venus à Paris, on a eu une première discussion sur la construction d'un protocole de coopération. On a rédigé les priorités c'est à dire ce qu'on voulait faire. On a proposé une première rédaction et jusqu'au congrès on a eu des échanges avec la présidente, Marie-Pierre Goyetche et le 1er vice-président, André Forest de votre organisation syndicale afin qu'on soit parfaitement d'accord. On a considéré que le congrès de la CGT à Toulouse en mars dernier était une occasion symbolique pour signer ce protocole d'accord entre nos deux organisations marquant leurs importantes relations.
3/ Concernant le programme l'avez-vous modifié voire adapté à notre public calédonien ?
M.L : C'est une obligation car en matière de formation de formateurs. La formation qu'on fait doit correspondre aux principes, aux valeurs, aux orientations d'une organisation mais aussi à la culture, à l'histoire du pays et de l'organisation. L'USTKE ce n'est pas la CGT. La Nouvelle-Calédonie, la Kanaky ce n'est pas la France métropolitaine donc c'est important de tenir compte de cela. C'est important de prendre le temps de lire les statuts, de lire les résolutions du congrès pour bien s'imprégner et offrir une formation qui corresponde exactement à ce qu'est l'organisation USTKE et de ce qu'elle veut faire de sa formation syndicale. Ça demande à ce qu'on travaille ensemble car je n'ai pas travaillé toute seule. Quand j'avais des doutes, je suis allée voir les autres camarades de la formation syndicale pour qu'on discute sur divers points. Donc, on a construit la formation pour qu'elle corresponde le plus qu'on pouvait à la réalité du syndicat et de la Nouvelle-Calédonie.
4/ On revient au stage. Quel est votre ressenti sur les stagiaires et le travail qu'ils ont fourni en une semaine passée avec vous ?
M.L : C'est une expérience positive. J'ai été un peu préoccupée au départ parce qu'il y avait beaucoup de stagiaires. A la CGT, on a l'habitude de travailler avec 12 à 15 stagiaires et là 20 voire 22 stagiaires. J'avais quelques craintes car ça peut limiter la participation mais en fait à ce stage, il y avait énormément de participation ! Les stagiaires ont vraiment été très investis, très motivés même si parfois ils avaient des doutes ou même s'ils étaient pas sûre d'avoir tout compris. Au début, sur les objectifs qu'on avait, ils ont vraiment participé à fond. C'est très satisfaisant d'avoir une équipe et de pouvoir travailler avec des stagiaires, de progresser ensemble, de construire un collectif de formateurs.
5/ Vous en tirez un bilan plutôt positif à la fin du stage.
M.L : Oui. De toute évidence les participants ont le sentiment d'avoir acquis des savoirs et des savoirs faire. Il ont maintenu et même augmenté leurs motivations pour faire et être des formateurs eux-mêmes. Et ça, c'est vraiment très positif.
6/ Les clés du programme, les ont-ils assimilés, les ont-ils acquis ? Ils pourront les transmettre ?
M.L : Oui, les grandes bases, les principes de la formation ont été intégrés et même ce qui n'a pas été intégré ! Ils repartent avec la conscience qu'une formation ça se construit, une expérience de formateur ça se construit. Donc, ils sont prêts à faire cette construction aux autres. Oui, c'était le principe de les mettre en capacité de travailler avec d'autres, de construire. Nous avons atteint cet objectif.
7/ Est-il prévu d'autres formations d'ici la fin de l'année voire l'année prochaine ?
M.L. : On a un autre projet puisqu'on s'était donné deux priorités en matière de formation syndicale avec l'USTKE dans le protocole : la formation de formateurs que l'on vient de réaliser et l'autre priorité c'est de proposer une formation de l'équipe de direction qui a été élue au congrès en décembre dernier. Donc là, on va se mettre au travail et construire cette formation ensemble pour pouvoir la réaliser avant la fin de l'année. Et ensuite, notre projet c'est de travailler progressivement avec l'USTKE pour la mise en place d'un plan de formation, de définir des priorités, de construire un système de formation afin de permettre au syndicat d'acquérir son autonomie et son indépendance et de construire ces plans de formation à l'avenir.
8/ Allez-vous dispenser la formation des cadres du syndicat ?
M.L. : Je ne sais pas encore. J'ai peu d'expérience sur la formation d'une équipe de direction. On va discuter et voir si ça sera quelqu'un d'autre qui a une expérience dans ce domaine. Les fondamentaux seront les mêmes c'est à dire que ça sera une formation basée sur l'expérience, sur la pratique de toute façon mais ça ne sera pas le même type de formation car on aura le collectif de direction dans son ensemble. On ne peut pas avoir une formation qui est là même de celle qu'on avait là. Il va y avoir en moyenne 30 stagiaires et beaucoup de travail en sous-groupe.
Après une semaine intense, les stagiaires ont reçu leurs attestations de réussite des mains du 1er vice-président de l'organisation (au premier plan, à gauche), André Forest et de Mariannick Lebris (au milieu).