vendredi 26 avril 2024

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L'espérance du peuple bolivien

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L'espérance du peuple bolivien


L'élection comme président d'un Indien, pour la première fois dans un pays d'Amérique du Nord et du Sud, rappelle une de ces hontes qui s'attachent aux colonisations : la marginalisation et l'exclusion des pouvoirs des peuples indigènes dont l'esclavage avait commencé dans les mines d'argent de Potosi. Le succès d'Evo Morales témoigne du réveil politique de ces populations visible également ces dernières années au Mexique avec les zapatistes ou au Guatemala. « La haine et la xénophobie dont nous avons souffert historiquement va prendre fin », a-t-il promis a cette majorité si longtemps traitée comme mineure. Il ne s'agit cependant pas d'une revanche ethnique mais de la victoire des pauvres de Bolivie, de ceux que les compagnies multinationales et les élites locales ont exploités et écrasés depuis si longtemps.


Evo Morales qui s'était affirmé comme le porte-parole des Indiens cultivateurs de coca qui permet de survivre hélas ! mieux que le maïs a fait de la nationalisation du gaz bolivien - le pays possède les deuxièmes réserves de son continent après le Venezuela - le coeur de son programme. Les ravages semés la -bas aussi par la mondialisation capitaliste, la perte de pouvoir d'achat, la misère d'un des pays les plus pauvres du continent ont fait naître un mouvement politique qui a surmonté les divisions et les manoeuvres des possédants.


Cette victoire d'un candidat de gauche n'est pas un accident en Amérique du Sud. Au Venezuela, au Brésil, en Argentine, en Uruguay, en Équateur, les forces progressistes l'ont emporté malgré le gendarme états-unien qui continue a considérer la région comme son arrière-cour. Mais aujourd'hui, même si l'envie ne lui en manque pas la Maison-Blanche ne peut plus faire débarquer aussi facilement ses marines quand les multinationales en éprouvent le souhait, piloter des coups d'État militaires depuis le bureau ovale et faire massacrer quelques dizaines voire quelques centaines de milliers de personnes impunément. Cependant, George W. Bush convoite toujours les hydrocarbures ici comme au Moyen-Orient, et il n'a renoncé a aucun coup fourré en dépit des scandales qui accompagnent sa présidence et de l'hostilité de son peuple a sa politique guerrière.


L'élection d'Evo Morales comme les autres succès électoraux de la gauche latino-américaine adviennent a la fin d'un long cycle de guerres civiles et de dictatures. Elles témoignent aussi d'un rapport des forces mondial qui ne se limite pas a l'escalade entre une superpuissance unique et des terroristes fanatiques. Arc-boutés sur leur credo ultralibéral, les dirigeants des grandes puissances ont fini par s'accorder a l'OMC, paraphant un accord au minimum, sans faire disparaître leurs rivalités ni l'impopularité de leurs choix.


Aujourd'hui, il faut espérer pour le peuple bolivien qu'Evo Morales réussisse. Mais notre pays ne peut pas se contenter d'une lettre de félicitations. Il doit s'engager afin que la Bolivie ne soit pas étranglée par les rétorsions de Washington ou des lobbys pétroliers et que les rêves d'indépendance ne soient pas fracassés. L'aventure bolivienne, bien solitaire a l'époque de Che Guevara, aura alors trouvé un bel épilogue.


Par Patrick Apel-Muller


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